Régulièrement à la suite d’une séance de massage les personnes reçues évoquent la différence entre ce qui les a conduit à prendre rendez-vous et leurs observations. Elles formulent cela par «je suis venu pour des tensions dans le dos, pour me détendre … mais quand vous massiez là, désignant une partie du corps, j’ai découvert d’autres tensions.».
Le toucher amènent notre attention à un endroit du corps où parfois nous découvrons des sensations jusque là insoupçonnées. Nous pouvons en rester là, mais il est également possible de dépasser l’anecdote pour s’inscrire dans une démarche où massage et développement personnel se rejoignent.
Le concept «La carte (notre représentation) n’est pas le territoire (notre réalité)»* illustre cette démarche de recherche d’une plus grande connaissance de soi par le massage.
Celui-ci, tout en contournant le raisonnement, attire l’attention sur des sensations qui révèlent son territoire à celui-celle qui reçoit. L’agréable/le désagréable, le tendu/le relâché, le raide/le souple, l’immobilité/le mobile, la légèreté/le lourd, les bosses/les creux … autant de ressentis pouvant venir compléter la carte initiale.
Pour cela le ressenti ne suffit pas, la modification devient possible si l’interaction, entre praticien et client, permet de nommer ce qui est présent corporellement. En nommant, nous portons ce qui est là, à la conscience. Dans cette recherche, nous pouvons considérer les sensations ressenties comme des «lanceuses d’alerte» invitant à examiner ce qui est présent à cet endroit. Cette connaissance produit un autre rapport à soi, à son environnement et crée une autre corporéité.
L’avantage du toucher est d’amener dans le «juste là» autrement dit «l’ici et maintenant»! Les mots lorsqu’ils sont présents se cantonnent à décrire et nommer. Cette exploration exige des modalités spécifiques. La confiance et l’entente établies entre le praticien et le client/cliente est incontournable. L’attention aiguë du praticien tant à ce qu’il perçoit au toucher qu’à ce qu’il observe, l’est également. Cette attention orientera le déroulement du massage et l’approbation de celle-celui qui reçoit, viendra confirmer ou ajuster le geste du praticien.
Les mouvements, les mimiques, les variations du rythme respiratoire et les demandes de gestes ou d’appui sont les modalités de communication du client. La mobilisation d’un toucher sensible et l’attention portée à ces manifestations corporelles, conduira le praticien à proposer un geste, à décrire et nommer ce qu’il voit …. C’est cette interaction qui structure la séance. Elle contribue à élaboration de l’action juste. C’est à dire, celle qui répond à l’exploration du territoire au rythme de l’engagement du client.
La démarche où plus grande connaissance de soi et toucher se rejoignent s’appuie, au-delà les modalité citées précédemment sur la puissance du toucher dans le massage. Puissance révélatrice d’un territoire pour celui-celle qui reçoit mais également révélatrice pour le praticien qui immanquablement sera confronté à trouver et proposer un réponse construite dans l’instant plutôt que modélisée. Puissance du toucher car il est la clé de voûte de cette alliance au service d’une relation singulière et partagée d’introspection.
*«La carte n’est pas le territoire» est un modèle mental qui nous vient d’Alfred Korzybski, philosophe, scientifique et expert des services de renseignement. Ce modèle nous rappelle de ne pas confondre notre propre représentation du monde (la carte) avec la réalité de ce monde (le territoire).
Un modèle mental est un concept, un système ou une manière de voir le monde qui nous aide à comprendre comment les choses fonctionnent.